A l'origine du projet Mellifor

Les populations d’insectes volants ont diminué de 75 % en près de 30 ans (1) et les insectes pollinisateurs sont en première ligne. Une enquête menée auprès des apiculteurs français montre par ailleurs que le taux moyen de mortalité des colonies d’abeilles domestiques durant l’hiver 2017-2018 est estimé à 29,4 %, très au-delà du taux de 10 % de mortalité hivernale qualifié de « normal » (2). Le déclin des abeilles tient son origine dans plusieurs causes dont les principales sont l’utilisation des pesticides et la diminution des ressources alimentaires liées à l'uniformisation des milieux agricoles (disparition des haies et des prairies permanentes) et à la dégradation ou la destruction des milieux naturels et semi-naturels. Les abeilles à miel (Apis mellifera) ne sont pas les seules concernées puisqu’en France on compte près de mille espèces d’abeilles sauvages (bourdons, abeilles solitaires, etc…). La bonne santé des abeilles, et plus largement de l'ensemble des insectes pollinisateurs, est donc l’affaire de tous, et pas seulement des apiculteurs.     

Et si nous forestiers commencions à nous interroger sur les capacités d’accueil des abeilles en forêt, lieu refuge offrant un large calendrier de floraison aux butineuses ? Une forêt résiliente et diversifiée est indispensable aux pollinisateurs qui font face à une dégradation constante de leurs milieux, mais tout comme l’agriculture, la bonne santé des forêts dépend également fortement de leur présence.

Mellifor

Objectifs du projet

En mars 2021, le CRPF et ses partenaires ont défini trois objectifs prioritaires au projet : 

  • Communiquer sur les pratiques favorables aux abeilles sauvages et domestiques auprès des propriétaires forestiers, des collectivités et du grand public ;
  • Améliorer nos connaissances sur les peuplements mellifères (état de la ressource en châtaigniers, techniques de plantation à valoriser...) ;
  • Accompagner la mise en relation entre apiculteurs et forestiers en portant à connaissance les critères d’accueil de ruchers et en mobilisant les propriétaires de peuplements mellifères.
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Gilles PICHARD @CNPF

Proposer un emplacement / Proposer des ruches

Vous êtes apiculteur en recherche d'un emplacement en forêt ; vous êtes propriétaire forestier disposé à accueillir des ruches dans votre forêt : remplissez le formulaire ci-dessous (1 minute) pour être mis en relation avec des personnes pouvant répondre à votre demande.

La localisation des emplacements disponibles est directement consultable sur la carte ci-dessous

 

 

La charte de bonnes pratiques apicoles et sylvicoles en Pays de la Loire

Ce document vise à accompagner la mise en relation entre apiculteur et propriétaire forestier en précisant la réglementation associée à l'installation de ruchers en forêt et les pratiques favorables à la préservation de l'ensemble des pollinisateurs.

Réunions forestières

Des rencontres en forêt entre apiculteurs et forestiers seront organisées pendant l’année à travers la région. Ces réunions permettront de partager l’expérience de propriétaires forestiers accueillant des ruchers et d’échanger sur les critères d’accueil de ruchers et sur les bonnes pratiques sylvicoles favorables aux pollinisateurs.  

Propriétaires forestiers, ces réunions peuvent aussi être l’occasion de rencontrer un apiculteur en recherche d’emplacements forestiers et d’avoir la chance de goûter le produit de votre forêt !

Prochaines rencontres à l'automne 2022 en Sarthe.

Communication sur les pratiques favorables aux abeilles

Auprès des propriétaires forestiers

Les abeilles sont indispensables au bon fonctionnement écologique d’une forêt en intervenant sur :

  • La régénération : de nombreuses plantes à fleurs, dont plusieurs espèces d'arbres, dépendent des insectes pour se reproduire, ce sont les essences entomophiles ;
  • La fertilité des sols : les larves de certains insectes pollinisateurs interviennent dans la dégradation de la matière organique ;
  • La chaîne alimentaire : ils assurent le rôle de proies mais également la pollinisation des fruits consommés par les animaux forestiers (3).

" Un déclin des pollinisateurs aura un impact sur la régénération des forêts en réduisant la diversité génétique des arbres de la forêt, leur résilience et leur potentiel d'adaptation "

Par Tiina Vahanen, chef de la Division des ressources et des politiques forestières à la FAO

De nombreux pollinisateurs dépendent fortement des forêts pour la nidification et le butinage. Les différentes plantes à fleurs qui y poussent offrent la fois une alimentation équilibrée pour les abeilles, qui doivent trouver dans leur alimentation des acides aminés spécifiques, et un étalement temporel des floraisons qui permet de fournir des ressources alimentaires quand celles-ci se font rares dans les autres milieux.

Dans le Grand Ouest, les colonies d’abeilles domestiques sont plus particulièrement en difficulté à la fin de la miellée de printemps, soit du 15 mai au 15 juin et en août (3). Il y a, sur ces périodes, un ralentissement du rythme de ponte des reines engendré par la diminution des ressources florales comme le présente le calendrier ci-dessous.

Calendrier - Pauline Marty

Le ministère de l’agriculture a publié une liste des plantes attractives pour les abeilles permettant de comparer leurs intérêts nectarifère et pollenifère (4).

Dans notre région, parmi les essences forestières particulièrement utiles aux pollinisateurs, citons :

  • Le peuplier : source majeure pour la production, à partir de ses bourgeons, de propolis qui sert à confectionner leurs habitats ;
  • Le châtaignier : deuxième essence feuillue de la région, les fleurs de châtaigniers permettent de produire un miel au goût puissant très demandé ;
  • Le saule marsault : il joue rôle fondamental en fin d’hiver pour stimuler la ponte de la reine en fournissant à la fois du nectar et du pollen ;
  • Le lierre : sa place dans l’écosystème est majeure car il produit les dernières fleurs de l’automne et permet de stocker les réserves avant l’hiver.

Selon le nouveau rapport de la FAO sur le rôle des forêts sur les pollinisateurs, les pratiques de gestion forestière peuvent avoir un impact significatif sur l’abondance et la diversité des abeilles (5). Les rencontres forestières entre apiculteurs et forestiers seront l’occasion d’’échanger sur les pratiques favorables aux différents besoins des pollinisateurs listés ci-dessous.

Besoins abeilles territoires

Voici quelques exemples de pratiques favorables qui seront illustrés lors des rencontres :

  • Orienter la gestion en faveur de peuplements mélangés et préserver le sous-étage arbustif ;
  • Conserver les clairières et les milieux ouverts associés ;
  • Varier les types de coupes pour favoriser une mosaïque paysagère ;

Pour la préservation des abeilles sauvages, la prise en compte de l’habitat est nécessaire en conservant les arbres à cavités et les bois morts sur pied (6).

Outre la résilience qu’un peuplement diversifié apporte à la forêt, certaines essences peuvent présenter un réel intérêt économique en particulier les fruitiers forestiers qui offrent un bois de grande valeur. Afin d’aider les propriétaires dans la valorisation de ces essences souvent présentes de manière disséminée, des fiches CNPF sur cette thématique sont disponibles ci-dessous (7 et 8). Pour intégrer ces arbres méllifères dans des projets de reboisement, des conseils techniques sur les bonnes pratiques en matière de mélange d'essences sont également consultables (9, p. 16)

Enfin, la majorité des pratiques de gestion présentées sont favorables à la biodiversité forestière dans son ensemble. L’indice de Biodiversité Potentielle (IBP) est un outil proposé aux propriétaires forestiers et aux gestionnaires pour analyser le potentiel d’accueil de la forêt et cibler les points améliorables par la gestion. Pour  en savoir plus, une présentation de l’IBP et une vidéo présentant la prise en compte de la biodiversité dans la gestion forestière sont consultables ci-dessous (10 et 11).

Auprès des collectivités

L'hétérogénéité et la connectivité des habitats sont essentielles afin de promouvoir la diversité des pollinisateurs et leur abondance. Les collectivités ont également un rôle important à jouer pour réinvestir en ressources mellifères les friches délaissées, les parcs et les zones péri-urbaines. Ci-dessous un exemple du label APIcité, valorisant les collectivités menant des initiatives pour les pollinisateurs

La prise en compte de cet enjeu dans les Chartes Forestières de Territoires pourrait permettre de mettre en place des projets locaux en faveurs des pollinisateurs et d’accompagner techniquement et/ou financièrement les acteurs qui veulent s’engager dans cet objectif.

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Auprès du grand public

Le travail des forestiers, souvent méconnu du grand public, pourra être mis en avant de façon positive lors de ces rencontres de par l’impact bénéfique de certaines pratiques de gestion sur les pollinisateurs.

Amélioration des connaissances sur les peuplements méllifères

Amélioration des connaissances sur les peuplements méllifères

Etat sanitaire du châtaignier

Selon les données de l’IGN, les Pays de la Loire comptent 38 000 ha de châtaigniers, ce qui en fait la deuxième essence feuillue de la région.    Il s’agit d’une essence de première importance pour les apiculteurs qui profitent de leurs miellées abondantes en début d’été mais qui se voient inquiets de l’évolution des peuplements et de leur choix de renouvellement.         

En effet, cette essence est à la fois malade (chancre, encre et cynips) et dépérissante (causes stationnelles, sylvicoles et climatiques). Son risque de mortalité est de plus accentué par le changement climatique. Les constats de terrain sont nombreux sans toutefois permettre la quantification des surfaces impactées. Afin d’identifier les peuplements en bonne santé et d’imaginer le renouvellement des peuplements dépérissants, la télédétection se révèle être un outil utile. En Dordogne, des modèles pour détecter les châtaigniers dépérissants ont déjà été construits par le CNPF (projet Casteldiag). Ils seront adaptés à notre région afin de mieux connaître cette ressource confrontée à des enjeux économiques et écologiques importants.

Essence également très appréciée des apiculteurs, le robinier faux-acacia, est encore peu présent en Pays de la Loire avec environ 1 000 hectares référencés dans les documents de gestion. Il pourrait représenter une alternative intéressante au châtaignier lorsque celui-ci n’est plus en station.

Ci-dessous un extrait du bilan annuel de 2019 du Département Santé des Forêts (DSF) de Pays de la Loire.

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Mireille MOUAS @CNPF
Techniques sylvicoles

La participation au projet des CETEF, Centres d'Etudes Techniques et Economiques Forestières, et la capitalisation des expérimentations à but mellifère permettra de progresser sur la connaissance des techniques sylvicoles valorisant les essences mellifères. L’objectif est de pouvoir faire des propositions adaptées aux propriétaires forestiers et aux financeurs des projets de reboisements.

Bilan DSF Santé

Accompagnement de l'apiculture en forêt

Conditions d'accueil de ruchers

Les principaux critères pour accueillir un rucher en forêt regroupent :

  • La présence de ressources mellifères abondantes ;
  • Un accès carrossable ;
  • Un terrain abrité des vents dominants et assez large ;
  • Un point d’eau à proximité, les abeilles en consomment beaucoup pour refroidir la ruche lors de fortes chaleurs.

Seul un apiculteur pourra ensuite confirmer si l’emplacement convient aux besoins de son rucher. Les besoins sont en effet différents selon le nombre de ruchers et le type de pratiques. La pratique de la transhumance implique d’avoir des miellées spécifiques et de pouvoir déplacer rapidement ses ruches alors que l’utilisation d’un emplacement permanent nécessite une continuité temporelle et une bonne diversité de ressources florales.

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Philippe Castano @ CNPF

Une brochure à destination des propriétaires récapitulant les informations pratiques pour l’installation d’un rucher (cadre réglementaire, conditions d’accueil, bonnes pratiques) sera mise à disposition. Une charte sera également proposée aux propriétaires et apiculteurs souhaitant formaliser leur collaboration et engagements réciproques. 

 

Certaines études montrent un impact négatif, dans certains contextes, des abeilles domestiques sur les pollinisateurs sauvages. Parmi les causes, la compétition alimentaire, un phénomène qui se produit lorsque plusieurs espèces utilisent concomitamment une ressource florale présente en quantité limitée. Dans certains cas, la compétition alimentaire peut entraîner une réduction

de la taille de la population, de la fécondité ou de la survie d'au moins une des espèces en interaction. Il s'agit donc de trouver un équilibre entre disponibilité de la ressource alimentaire et densité d'abeilles domestiques. Une réflexion est actuellement menée sur cette question, en lien avec le GRETIA et l'ITSAP, pour intégrer cet enjeu dans la charte des bonnes pratiques prochainement proposée. 

Nos partenaires

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Guide "Insectes pollinisateurs et forêt"

Les interactions entre forêt et pollinisateurs font l’objet d’un guide réalisé par le CNPF révélant leur interdépendance à des niveaux parfois insoupçonnés !